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« Ombres de nuit, ombres de jour », exposition de photographies de Jocelyne Alloucherie

Appartements princiers du Château de Chaumont-sur-Loire, 5 avril 2014 - 2 novembre 2014

 

Les paysages oniriques de Jocelyne Alloucherie

Depuis plusieurs années, Jocelyne Alloucherie travaille sur la notion de paysage et d’architecture au moyen de la photographie et de la sculpture.
Dans ses dispositifs d’installation, Jocelyne Alloucherie joue sur le rapport entre le lieu d’exposition et le regardeur. À travers des configurations complexes, son œuvre explore de manière conceptuelle et poétique des notions relatives à l’image, à l’objet et au lieu. Ses ombres de nuit jouent magnifiquement avec la lumière, la pierre et le végétal qu’elles transfigurent offrant d’oniriques images en mouvement.

L’oeil de Sylvain Campeau sur « Ombres de nuit, ombres de jour »

« Tous, nous avons probablement déjà vu un jour cette image de la lune, blanc sur noir, où elle nous apparaît noyée d’ombre, à demi-grugée par celle-ci. Alors que le côté sombre semble aller peu à peu vers l’inexistence la plus crue, la part lumineuse montre son relief. En fait, elle le fait de manière si manifeste que l’on est d’autant plus confronté à la dissolution de toute matière dans l’autre partie. On croirait voir une sorte de sculpture menacée par un néant encore actif, grandissant. En cette image, forme sculpturale et nette image en viennent à naître de concert. Elles doivent en fait cette naissance gémellaire à l’ombre dont toutes deux sont issues, l’image devenue encore plus nette du fait qu’elle semble s’extirper du néant, la sculpture aux formes d’autant plus voluptueuses qu’elle provient de la même vacuité.
L’ombre serait ici à la fois mère de la photographie et de la sculpture.
Dans les « Ombres de nuit, ombres de jour » le rapport apparaît encore plus pernicieux. L’ombre tombée sur la maçonnerie découpe celle-ci et transforme en masse sculptée une surface étale. Entre ces silhouettes fibreuses, chaque mur gondole, tangue, avoue son relief. En plus, les ombres effilochées révèlent d’autres formes tridimensionnelles veillant sur les habitats, branches et arbres lointains. Elles sont ici images certes, mais c’est pour être encore mieux là-bas, par derrière le point d’où la scène fut saisie, matières réelles et denses. 
Il en va en fait comme si les ombres accusaient la sculpture alors que les images par elles créées, la récusaient. Cette indétermination voulue, partout reprise dans les œuvres de Jocelyne Alloucherie, est jeu et oscillation. Cela est encore plus vrai quand on constate que certaines des masses ouvrées, aux relents architecturaux, ne se contentent pas de surplomber ou d’ouvrir sur les images. Elles se drapent parfois des plis d’un voile, véritable suaire portant les arabesques d’une image minimale, faite de motifs d’ombres, elle aussi. C’est un même jeu rusé qui a mené à la création de ces toiles, car on sait bien que l’image sur elles jetée est le résultat d’une incrustation, qu’elle est faite de matières indurées. Voile et écran, la toile dérobe et révèle, Matière ondulante, elle est de plus, pour l’image, l’instabilité même, accusant le caractère impermanent de celle-ci à laquelle en succède toujours une autre. 
Ainsi, les médiums en viennent-ils à une sorte d’annulation réciproque, programmée, et cela achève de nous projeter, sans recul, au sein des formes et des choses qui, aussi créées soient-elles, s’offrent comme les effets mêmes du monde. »

Sylvain Campeau, novembre 2013

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    Vue de l'exposition « Ombres de nuit, ombres de jour » dans les Appartements princiers du Château de Chaumont-sur-Loire

  • Vue de l'exposition « Ombres de nuit, ombres de jour » dans les Appartements princiers du Château de Chaumont-sur-Loire

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    Vue de l'exposition « Ombres de nuit, ombres de jour » dans les Appartements princiers du Château de Chaumont-sur-Loire