Depuis 1948, Barbara Crane se consacre à la photographie pour communiquer avec le monde, exprimer sa créativité et avancer dans ses réflexions personnelles. Le résultat est un ensemble important d’images aux approches et aux pratiques très diverses. Barbara Crane est une photographe dont la curiosité et le goût de l’expérimentation ont toujours guidé sa très longue carrière. « Je cherche toujours à renouveler ma façon de voir et de penser et à débarrasser systématiquement des habitudes. J’essaye aussi de trouver une nouveauté dans la vision. »
« Challenging vision »
« Un regard en mouvement » est le titre de l’importante exposition consacrée au travail photographique de Barbara Crane qui s’est tenue en février dernier au Amon Carter Museum au Texas et qui a été présentée en octobre dernier au Chicago cultural Center. Ce titre illustre parfaitement l’oeuvre et la carrière d’une photographe née en 1928 qui fait toujours preuve d’une activité débordante, d’une curiosité exigeante et qui explique « J’ai besoin de travailler pour être heureuse ».
« Il valait mieux mieux ne pas avoir un appareil photo pour trouver un mari »
Elevée dans un esprit de discipline et d’efforts et ne voulant pas être taxée d’amateurisme ou de dilettantisme, Barbara Crane s’est très rapidement donnée à elle-même des défis qu’elle relève tout au long de sa vie. Comme elle le dit elle-même : « Je suis née à une époque où l’art n’était pas fait pour les femmes et où il valait mieux ne pas avoir un appareil photo pour trouver un mari. » (« You lost your boyfriend if you wielded a camera »)
« La noble famille de ceux qui ressentent émotion et fascination pour le tirage. »
Très tôt, elle découvre le travail de la chambre noire qui la passionne et, excellente technicienne, elle expérimentera tous les modes de prises de vue et de tirage qui se présenteront sans toutefois jamais tomber dans cet amateurisme qu’elle redoute. Elle réalisera et continue à réaliser (… maintenant en numérique : « Je ne suis pas morte ! » lance-t-elle à ceux qui lui parlent du passé) des séries accomplies sur des sujets qu’elle renouvelle à chaque fois et dont la perfection du traitement faire oublier le savoir-faire. Un travail sur l’expérimentation de la forme qui ira jusqu’à la rencontre de la musique sérielle avec John Cage en particulier.
Espiègle mais rigoureuse, elle fait preuve d’engagement et de passion et cherche constamment à traiter simultanément les aspects formels et émotionnels du médium. Sa production importante, qui va des « Petites Choses » de dimensions réduites aux images murales à échelle industrielle de plusieurs mètres de long, montre une grande cohérence et une grande intégrité dans sa vision en même temps qu’une grande virtuosité technique. Discrète de sa personne, elle est complexe, cérébrale et pleine de hardiesse pour poursuivre son but. Elle appartient aussi à la noble famille de ceux qui ressentent émotion et fascination pour le tirage.
The Miles College on Oakland : « The best thing that could have happened to me ».
Formée à l’histoire de l’art au Miles College, un enseignement décisif dans sa formation, elle entre très tôt en contact avec la photographie et découvre le travail de Laszlo Moholy-Nagy, Gyorgy Kepes et aura tout au long de sa carrière l’occasion de se lier d’amitié ou de travailler avec de nombreux photographes américains comme Imogen Cunningham, Ansel Adams ou Aaron Siskind dont elle sera l’étudiante à l’Institute of Design de Chicago. Elle entame sa carrière photographique en travaillent chez Bloomingdale’s à New York en faisant des portraits d’enfants. Ce n’est que dans les années 60, la séparation avec son mari prononcée et ses trois enfants élevées qu’elle pourra avec une plus grande liberté mener sa carrière de photographe tout en restant une mère attentive et responsable.
En 1966, elle est diplômée de l’Institute of Design pour sa thèse : « A Search for form in the Human figure » composée de 90 photographies noir et blanc.
Chicago dont elle est professeur émérite de photographie occupera également une partie importante de sa carrière.
Séries exposées à la Galerie
- Néons – 1969
Cette série, noir et blanc, exposée à Lectoure en 2007, a été réalisée en 1969, et fait intervenir une double exposition. Une première image de néons est enregistrée sur laquelle vient se superposer ensuite un portrait. La différence d’échelle entre les deux sujets donne une profondeur spatiale inattendue à l’image. Dans ces images pour lesquelles Barbara Crane a utilisé un agrandisseur très particulier, les lampes des néons semblent créer des perforations à la surface de l’image sans toutefois suggérer l’idée d’une mutilation.
- Chicago Loop – 1976-1978
Pour cette série, réalisée après la production d’un mur d’images monumental pour le siège de la Chicago Bank, elle décide de revenir à la conception d’images uniques dont le sujet sera les façades des immeubles de Chicago. Elle investit alors dans ces images ses conceptions esthétiques et graphiques et bâtit son propre design urbain cherchant à capter le moment décisif où les structures, la lumière et les ombres créent un nouvel ordre visuel.
- Polaroïds – 1980
Ces images ont été réalisées entre 1980 et 1984 à l’occasion de différents festivals qui ont eu lieu à Chicago. Elles sont la description d’une expérience qui dans sa singularité atteint une forme d’universalité, elles sont aussi l’enregistrement immédiat d’un moment bien précis par le Polaroïd, cet outil de l’unique devenu malheureusement obsolète. Elles ont été prises aux heures les plus chaudes de l’été, très près des sujets, avec un matériel lourd et encombrant dont un appareil 4 x 5 super graphic 45 et des boîtes de films. « Elles sont vraiment le résultat d’un travail amoureux » dit d’elles Barbara Crane.
La série des Polaroïds, polaroïds grand format, consacrés à des objets trouvés accrochés sur des grillages, a été plusieurs fois présentée à Art Brussels, Art Basel et à la FIAC et de nombreux tirages font partie maintenant de collections publiques ou privées.
Expositions / Publications
A l’occasion de l’exposition rétrospective qui s’est tenue en 2009 à l’Amon Carter Museum au Texas et au Chicago Cultural Center en Illinois, publications de deux nouvelles monographies :
– Barbara Crane : Challenging vision – The University of Chicago Press – 2009
– Barbara Crane : « Private Views »
Introduction par Barbara Hitchcock, Directrice des Affaires culturelles de la Polaroïd Collections
Edition : Aperture Foundation et Galerie Stephen Daiter – 2009
Toutes les publications de Barbara Crane sont en consultation à la Galerie.
Cette exposition est réalisée en collaboration avec la Galerie Stephen Daiter de Chicago.
Remerciements à Françoise Morin, Stephen Daiter et Michael Welch.